Je veux parler d’un petit sentier que j’ai marché bien souvent pour me rendre à l’atelier. Devant sa fenêtre, un ponton s’envole vers de larges perspectives tandis qu’à son côté deux rails plongent dans l’eau. Sur leurs tranches on peut y lire « Phoenix 1902 ». C’est sur elles que Monsieur et Madame Canard viennent se reposer le soir venu.
On peut le longer à l’abri des saules et des bouleaux jusqu’à la plage bordées de trembles et de peupliers. Ils sont alignés et dressés comme de fragiles cathédrales que les tempêtes d’été viennent parfois coucher sur le sable.
Passé le pont et le petit bois, je suis arrivé sur la seconde plage.
Je veux parler de celle, plus sauvage, qui est cernée par de vieux troncs sur lesquels il fait bon se reposer.
Là, je fus intrigué par l’apparition de deux chevaux dont je ne voyais que la tête émerger de l’eau à une vingtaine de mètres du rivage! Au premier abord, ne voyant aucune présence humaine à leurs côtés, je suis resté figé devant ce spectacle inaccoutumé. Rêvant à quelques peintures mythologiques ou encore à une ancienne photographie sur laquelle on pouvait voir un jeune cavalier à demi-nu baignant sa monture sur la plage de Vidy. Je me mis à espérer que le temps s’arrête pour revivre l’envie que j’avais, enfant, de pénétrer à l’intérieur de certains tableaux historiques!
Ce n’est que peu après que je vis la tête de deux filles, invisibles jusqu’alors, qui nageaient à leurs côtés!
Je repense souvent à ce spectacle insolite. Il est fixé dans ma mémoire comme celui de certains rêves qui ont participé à mes peintures. Moins décrits, leurs souvenirs témoignent cependant d’instants présents qui ne seront jamais plus!
Allons , je crois qu’il est temps que je nettoie mes pinceaux ….
Préverenges, en attendant le printemps .